26 décembre 2014 – L’affaire Alstom : des jeux d’influence très troubles

Publié le 26 décembre 2014 par Bruno Racouchot

Racket américain et démission d’Etat – Le dessous des cartes du rachat d’Alstom par General Electric C’est sous ce titre sans ambiguïté que Leslie Varenne et Eric Denécé ouvrent le Rapport de Recherche n° 13 de décembre 2014 du CF2R (Centre français de recherche sur le renseignement – www.cf2r.org). Si les faits sont avérés, il s’agit là d’une véritable affaire d’État, qui nous intéresse ici à double titre : d’une part parce que les intérêts supérieurs de notre pays sont touchés ; d’autre part parce que l’on y décèle en arrière-plan des jeux extrêmement troubles d’influence, dans le plus mauvais sens du terme, tels qu’on sait si bien les activer outre-Atlantique… Décortiquer soigneusement cette affaire, comme l’ont fait les chercheurs du CF2R, permet de mieux comprendre les enjeux de cette terrible Guerre économique que Pascal Gauchon a parfaitement mis en relief dans le dernier numéro de la revue Conflits (http://www.revueconflits.com/), commenté à la mi-décembre sur ce blog. Regardons donc de plus près : dans cette affaire Alstom, qui concerne les plus hautes autorités de l’État, quels sont les faits ?

Le 19 décembre dernier, l’assemblée générale des actionnaires d’Alstom autorise la vente des activités de la branche Énergie à General Electric. Derrière le discours lénifiant qui prétend justifier cette cession, Leslie Varenne et Eric Denécé estiment qu’en réalité, « la France a capitulé devant son allié américain en lui cédant dans des conditions litigieuses et rocambolesques les activités rentables et pour partie stratégiques d’un fleuron de son industrie », relevant qu’il est pour le moins troublant « que la France ait cédé sans état d’âme une entreprise dont les activités sont si importantes pour son indépendance. » Entre ici en jeu la logique de ce que l’on peut appeler l’influence par les normes ou par le droit, logique que maîtrise à merveille l’administration nord-américaine. Ainsi, « les risques liés aux procédures judiciaires pour corruption engagées contre Alstom dans de nombreux pays ont joué un rôle déterminant dans le rachat de la société française. La justice américaine a su habilement exploiter les craintes des dirigeants du groupe. En effet depuis plusieurs décennies, les règles juridiques édictées à Washington s’imposent au reste du monde, au détriment des droits et des intérêts des autres nations. » Enfonçant le clou, les auteurs précisent que ce sont bien ces règles « et non une soi-disant complémentarité économique ou la recherche de la taille critique, qui sont à l’origine de la cession de la branche Énergie du groupe français. »

Les auteurs pointent du doigt deux faits majeurs qui méritent que l’on s’interroge sur l’attitude de ceux qui, en France, dans le monde politique comme dans la haute administration, ont en théorie pour mission première de veiller à la défense et à la promotion des intérêts supérieurs de notre pays… et font dans les faits exactement l’inverse ! Il y a « d’une part, l’attitude de nos ‘élites’ qui, derrière un discours circonstancié sur la mondialisation – mais en réalité motivées par la satisfaction d’intérêts personnels ou la dissimulation d’erreurs stratégiques – sont en train de vendre nos joyaux industriels à l’étranger, n’hésitant pas à sacrifier notre indépendance militaire et nucléaire ; d’autre part, l’incompétence et l’impuissance des politiques, qui n’ont toujours pas compris ce qu’était la guerre économique moderne et se révèlent incapables de défendre nos intérêts. Dans ce dossier, rien n’a été fait pour sauver Alstom, le gouvernement n’a pas été à la hauteur des enjeux. » En outre, les auteurs ont relevé « une multiplication d »affaires’ dans l’affaire : suspicion de manipulation de cours et de délits d’initiés, conflits d’intérêts, projet de déménagement du siège d’Alstom à Singapour, etc. »

Pour toutes ces raisons, Leslie Varenne et Eric Denécé estiment que nous nous trouvons aujourd’hui confrontés à un « véritable scandale d’État ». Est-ce exact ? Et si les faits sont confirmés, quelles seront les suites données à cette affaire ?…

Bruno Racouchot, Directeur de Communication & Influence

Présentation du rapport sur le site du CF2R

Télécharger le rapport du CF2R sur l’affaire Alstom

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