21 juin 2013 – Le rôle négatif du soft power bruxellois dans la démilitarisation de l’Europe

Publié le 21 juin 2013 par Bruno Racouchot

On cantonne bien trop souvent le débat sur l’avenir de la Défense à des considérations budgétaires ou techniques. Le mérite du jeune chef de bataillon Jean-Baptiste Vouilloux est d’aller plus loin et de dégager les racines profondes de cette désaffection des élites européennes à l’endroit de la chose militaire. Dans La démilitarisation de l’Europe, récemment publié aux éditions Argos (sous la direction d’Olivier Zajec, par ailleurs successeur d’Hervé Coutau-Bégarie à l’Ecole de Guerre), Jean-Baptiste Vouilloux ne pratique pas la langue de bois. Entre autres maux, le monde militaire souffre d’une détestation feutrée de l’univers bruxellois. Les représentations mentales que se font de l’armée les hauts responsables européens sont partisanes et détestables. « La plupart des hauts fonctionnaires européens pèchent par manque de convictions dans le sens où ils n’adhèrent pas à l’idée d’une Europe forte militairement. Ce constat peut sembler caricatural mais il est parfaitement illustré par le peu d’appétence dont fait preuve Catherine Ashton, la Haute Représentante de l’UE pour les affaires étrangères, vis-à-vis de l’Europe de la défense. Il faut dire que son passé de militante pour le désarmement nucléaire ne la prédispose pas à accorder une confiance démesurée aux forces armées. Tous les militaires qui ont servi au sein des institutions européennes à Bruxelles ont pu y constater leur marginalisation, voire le malaise suscité par la simple vue de l’uniforme. » 

On se trouve là dans une configuration intéressante sur le plan des jeux de pouvoir. Le hard power est nié dans son essence même par les tenants du soft power bruxellois. Comme le remarque J-B Vouilloux, « cette culture de la non-violence est particulièrement perceptible chez les fonctionnaires originaires d’Europe du Nord, dont les sociétés adhèrent profondément aux principes du soft power et rejettent toute forme de violence. » Même s’il n’est fort heureusement pas partagé par tous, ce « tropisme pacifiste explique le désarroi éprouvé par l’Union Européenne quand elle est confrontée à la violence d’Etats qui ne partagent pas son optique. Par exemple, en 2008, le coup de force russe en Géorgie est venu rappeler aux Européens que leurs moyens de pression pouvaient sembler bien dérisoires face à la détermination d’un Etat. » Il nous faut donc revenir à un peu de bon sens, comme l’ont expliqué fort justement ces derniers mois dans les colonnes de Communication & Influence des personnalités aussi diverses que le général Desportes, la présidente de la Commission Défense à l’Assemblée nationale Patricia Adam, ou encore le général de Saint-Chamas commandant la Légion étrangère : il ne peut y avoir de soft power digne de ce nom sans un socle de hard power. L’Europe ne sera grande que dans la puissance conjuguée du hard et soft power. Les fonctionnaires et élus de Bruxelles seraient bien avisés de s’en souvenir…

Bruno Racouchot, Directeur de Communication & Influence

Références de l’ouvrage

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